Le hooliganisme existait déjà au siècle dernier. Le hooliganisme moderne existe depuis les années 60 dans plusieurs pays. Des garçons et des jeunes gens âgés de 15 à 25 ans se livrent collectivement à des bagarres, des destructions et des provocations. Leurs principales cibles sont d'autres groupes qui ne se distinguent d'eux que par le fait d'être des supporters d'une autre équipe de football.
Dans les commentaires qui font suite à ces incidents, il est communément dit que ces «supporters» ne méritent pas ce titre. D'autres signalent que les hooligans se considèrent comme les authentiques supporters de leur équipe: ils la soutiennent pour le meilleur et pour le pire, et créent «l'ambiance» si prisée dans les stades. Quoiqu'il en soit, leur allégeance à une équipe de football est le principal lien qui unit les hooligans. Ils semblent moins motivés par l'envie de voir un beau spectacle de football que par celle de voir gagner leur équipe. En outre, les hooligans livrent leur propre match avec les supporters rivaux, ce qui est parfois le plus important. Les matches de football fournissent l'occasion souhaitée.
Le comportement des hooligans semble correspondre à une recherche de prestige. La capacité de se battre, la solidarité du groupe, la loyauté ainsi que la défense agressive de zones culturellement définies sont autant d'éléments d'une identité masculine gratifiante. Les bagarres qui ont lieu dans le cadre du football sont pour de jeunes hommes une manière de mettre leur virilité à l'épreuve face à celle d'autres jeunes hommes aux motivations identiques.
La rivalité et la confrontation entre groupes de supporters semblent à bien des égards comparables à celles existant entre les bandes de jeunes, phénomène bien connu, aux Etats-Unis entre autres. On peut également établir un parallèle avec les luttes tribales.

Les facteurs propres au football
La corrélation est faible entre les facteurs propres aux matches de football et le hooliganisme. Le résultat du match influe peu sur l'ampleur de la violence qui explose à la fin du match. En général, le hooliganisme contemporain ne semble pas être causé par ce qui se passe sur le terrain  un arbitrage contesté ou altercations violentes entre joueurs. Naturellement, des événements de ce genre peuvent parfois provoquer des altercations violentes sur les gradins mais l'événement sur le terrain le plus déterminant pour le déclenchement d'actes de hooliganisme est le marquage d'un but.
A l'extérieur des stades, la violence est en général plus fréquente après le match qu'avant, sans que cela semble lié à l'accumulation des frustrations au cours du match. C'est avant les matches que les supporters semblent le plus désireux d'éviter d'être arrêtés (afin de ne pas manquer le match). En outre, des actions concertées des supporters avant le match demandent plus d'organisation et d'entente.

Les hooligans
Malgré les efforts déployés pour trouver un lien entre le hooligan et son milieu social, la masse d'informations sur ce sujet n'autorise qu'à une conclusion certaine: il n'y a aucun lien systématique entre le vandalisme et l'environnement social. Il semble, au contraire, que les hooligans proviennent des milieux les plus divers et qu'ils ne se recrutent pas, dans leur majorité, chez les chômeurs et autres défavorisés. Le hooliganisme ou les comportements de même nature ne se limitent pas non plus à une ville, à une région ou à un pays donnés. Les hooligans ressemblent souvent à d'autres jeunes gens qui ont des difficultés à l'école ou dans leur milieu familial, surtout dans leurs relations avec des figures d'autorité (conflits avec les enseignants, etc.), et en l'absence quasi totale de contrôle social. Il est indubitable que les jeunes hommes les plus enclins à la violence sont attirés par les possibilités qu'offrent l'appartenance à un camp et la participation à un match à risques.
Chaque fois, ce n'est qu'une relativement petite partie du groupe à risques qui se rend coupable de comportements violents. Ces observations semblent être conformes à l'image consacrée d'un noyau relativement petit autour duquel gravite un groupe beaucoup plus nombreux de «suiveurs». Toutefois, le comportement du groupe environnant est très important: leur soutien passif ou actif et l'absence de toute forme de condamnation facilite le déclenchement et/ou l'escalade de la violence. Les meneurs du noyau dur jouent le rôle d'instigateurs et d'organisateurs mais il n'existe pas d'organisation formelle avec des «chefs». Le comportement humain des foules de spectateurs du football semble être influencé par les mêmes facteurs que le comportement quotidien, «normal», des êtres humains.

Contexte, cause et fonction
L'un des principaux facteurs à l'origine du hooliganisme réside dans le désir de gagner du prestige à la fois au sein du groupe et par rapport au groupe rival. La fréquence de la violence semble être fortement liée aux relations existant entre les deux groupes de supporters: lors de rencontres entre deux clubs à risques, la violence est deux fois plus grande que dans les rencontres entre un club à risque et un club qui ne l'est pas. Pourtant, les rencontres entre deux clubs réputés sans risques se caractérisent souvent par une violence étonnante lorsque des supporters extérieurs sont présents. Il semble que les risques de violence soient à leur maximum si le rapport de forces est incertain.
La rivalité entre différents groupes peut avoir des racines historiques et procéder de rivalités non liées au football telles que l'hostilité entre des régions ou des villes. Par le biais des confrontations à l'occasion de matches de football, de nouvelles rivalités peuvent naître ou d'anciennes peuvent se ranimer.
La violence particulière qui marque les rencontres entre deux clubs à risque n'est pas le seul élément donnant à penser que la rivalité est une cause plausible de la violence des supporters. On peut en voir une autre illustration dans le fait que la violence (notamment celle entre supporters, qui est la forme la plus courante) commence souvent sans cause préalable évidente et que les différents groupes de supporters se donnent manifestement beaucoup de mal pour entrer en contact, en se lançant fréquemment des défis. En outre, la manifestation de la violence est vécue par les supporters comme quelque chose d'«amusant», d'«excitant».
Le fait que les buts marqués qui donnent l'avantage à une des équipes sont suivis d'actes de violence qui peuvent être le fait tout autant des supporters de l'équipe qui a gagné que de ceux de l'autre équipe vient également étayer cette théorie de la rivalité.
Seule une petite partie des nombreuses provocations est suivie de violence. Les provocations (qui consistent en injures et en menaces) semblent servir davantage de démonstration d'harmonie interne.
Parfois, l'application de mesures policières est aussi suivie d'actes de violence mais presque exclusivement entre les supporters concernés et les forces de police (et dans une faible mesure contre des biens).

Evolution
Les manifestations d hooliganisme ont progressivement changé au cours du temps. La nouveauté la plus remarquable a été la dissociation du hooliganisme et des matches de football. Les premières explosions de hooliganisme étaient étroitement liées aux incidents survenant sur le terrain. Les confrontations violentes entre groupes de supporters rivaux sur les gradins ont constitué la deuxième étape. Du fait, en partie, des mesures de sécurité, les supporters ont commencé à occuper des places plus ou moins fixes sur les gradins, qu'ils ont commencé à considérer comme leur territoire. Au stade suivant, pour échapper aux mesures de sécurité, ils ont commencé à occuper des places en dehors de leur territoire. Ils ont également commencé à se rendre à des matches auxquels ne participait pas leur équipe, uniquement pour avoir la possibilité de se mesurer aux groupes de supporters rivaux. On a, enfin, assisté à des confrontations sans lien aucun avec le match de football.
Cette évolution a été mise en branle, dans une large mesure, par les mesures de sécurité prises pour séparer et maîtriser les groupes de supporters rivaux (l'utilisation de la T.V. en circuit fermé, par exemple). Des éléments de plus en plus nombreux tendent à prouver que la menace de nouvelles mesures, éventuellement efficaces, telles que des caméras vidéo et des laissez-passer, peut entraîner une évolution indésirable. Les hooligans répondent aux nouvelles mesures policières par de nouvelles tactiques.
Autre aspect important de cette évolution: les supporters sont mieux organisés, leurs actions mieux coordonnées. Au début, la coordination interne était pratiquement inexistante: les supporters qui voulaient se battre se rendaient au match et savaient qu'ils rencontreraient des gens partageant le même état d'esprit avec lesquels ils pourraient provoquer les supporters de l'équipe adverse. Les confrontations suivaient des modèles prévisibles et des règles simples. Progressivement, les hooligans suivant une équipe ont commencé à s'organiser. Le renforcement des mesures de sécurité a rendu nécessaire une certaine préparation: voyages de reconnaissance, achat des billets à l'avance le cas échéant, coordination des tactiques, organisation commune des déplacements, etc.
Dans les premières années, l'alcool a probablement joué un rôle important dans l'explosion d'incidents. Actuellement, il ne semble pas être un facteur prépondérant, en partie parce que la consommation d'alcool est interdite au moment des matches. D'ailleurs, même les supporters semblent être conscients qu'il n'est pas très avisé d'être sous l'influence de l'alcool lorsqu'ils affrontent délibérément des groupes rivaux. La consommation de drogues est en augmentation, notamment celles qui inhibent la peur et qui semblent accroître l'énergie.
La majeure partie des hooligans appartiennent encore à la tranche d'âge des 15  25 ans. En vieillissant, les hooligans s'intéressent davantage à leur vie professionnelle et familiale et ont tendance à prendre leurs distances. Néanmoins, la proportion de «vieux» hooligans semble être en augmentation. Certains signes montrent même que des hooligans plus âgés ont fait leur retour après quelques années d'absence.

Le hooliganisme dans le football


Otto Adang


Rapport préparé au profit de M. Gerrit Valk (Pays Bas, le Groupe Socialiste) dans sa capacité comme rapporteur au Comité de la Culture et de l'Education, le Conseil d'Europe (Document. 8553, 1999 le 30 septembre)
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La lutte contre le hooliganisme


Une démarche intégrée
Au fil des ans, force a été de reconnaître que la police ne peut ni ne doit s'attaquer au hooliganisme toute seule et qu'une démarche intégrée est nécessaire, associant toutes les parties concernées.
Dans la pratique, les mesures sont en général axées sur les manifestations du hooliganisme, en partie parce que la rivalité entre supporters est un facteur sur lequel on a peu de prise. Les modifications apportées à l'infrastructure des stades (grillages, caméras, stade ne comptant que des places assises) ont facilité la surveillance et la séparation des supporters, de même que l'organisation de la billetterie. Toutefois, une approche exclusivement axée sur les mesures de sécurité pourrait nuire au climat de convivialité.
Des stadiers bien formés peuvent contribuer largement à l'hospitalité, et permettre un signalement rapide des troubles éventuels dans l'enceinte des stades. Le comportement des joueurs, des entraîneurs et des officiels des clubs a aussi une influence sur le comportement des supporters; et les associations de supporters jouent également un rôle important.
Les forces de sécurité sont chargées du maintien de l'ordre public et de l'arrestation des contrevenants. Le ministère public et les juges s'occupent des délinquants appréhendés. Les compagnies ferroviaires et d'autocars s'occupent du transport des supporters. Les collectivités locales ont leurs propres priorités.
Pour prévenir les excès du hooliganisme, toutes ces parties doivent élaborer des politiques communes et coopérer les unes avec les autres. Si les différentes mesures ne sont pas rendues publiques, si elles ne sont pas intégrées les unes aux autres et si les dispositions prises ne sont pas contraignantes, elles n'auront pas le succès escompté.
La présence de supporters visiteurs et la séparation des supporters
Comme on l'a indiqué, la rivalité entre les supporters locaux et les supporters visiteurs est fondamentale pour l'existence du hooliganisme. Il y a un lien évident entre le nombre de supporters visiteurs assistant à un match de football et les risques de violence. Ceux-ci sont moindres quand les supporters venus de l'extérieur sont moins nombreux. Parmi les mesures ayant une influence directe ou indirecte sur le nombre de supporters visiteurs assistant à un match, citons les matches joués sans public, la non-admission ou l'admission à certaines conditions des supporters visiteurs, la retransmission en direct du match à la télévision ou la vente anticipée de billets (qui rend l'achat de billets plus difficile pour les supporters). Les matches en soirée ou les matches organisés pendant la semaine attirent généralement moins de supporters de l'extérieur.
Il ne s'ensuit pas automatiquement que l'exclusion des supporters visiteurs est la méthode la plus efficace pour réduire le hooliganisme. L'application d'une telle mesure est en contradiction avec une tradition appréciée et pose de nombreux problèmes potentiels d'ordre pratique. En outre, les supporters s'opposeraient probablement à cette mesure, ce qui pourrait aussi entraîner des violences. Il est également probable que le hooliganisme se manifesterait en d'autres lieux et à d'autres moments.
La violence des supporters peut se produire en l'absence de groupe rival. La violence des supporters locaux peut être dirigée contre:

·d'autres supporters locaux: en l'absence de groupe rival, un désaccord entre deux sous-groupes différents peut entraîner des violences;
·les joueurs d'un club visiteur et/ou l'arbitre et les juges de touche si le club qui reçoit perd;
·des joueurs/la direction, etc., de leur propre club lorsque l'équipe a de mauvaises performances;
·le service d'ordre, etc., dans le cas de ceux qui n'ont pas de billet pour le match;
·des cibles de toute sorte, lors de la célébration d'une victoire ou d'un championnat (les incidents de Rotterdam en avril 1999, par exemple).

Si des supporters visiteurs sont présents, la police tente généralement de maintenir les deux groupes de supporters séparés. Dans la pratique, cette politique n'est cependant pas mise en uvre de manière cohérente. La séparation des supporters extérieurs et des supporters locaux a un effet secondaire défavorable: le phénomène du «camp» et tout ce qui y est associé. La séparation contribue donc aussi à la persistance du problème du hooliganisme.
La séparation ou l'absence de séparation entre les supporters dépend également de la détermination avec laquelle les supporters locaux cherchent la confrontation avec les supporters visiteurs. De nombreuses mesures peuvent faire avorter les tentatives de recherche de confrontations des supporters sans éveiller leur hostilité, par exemple:

·le choix d'une gare d'arrivée et de départ éloignée du lieu où le match doit se jouer;
·le cas échéant, la modification des itinéraires de transport de manière à ce qu'il soit impossible ou, du moins, difficile pour les supporters locaux de les connaître ou d'y accéder;
·le choix d'itinéraires différents pour les supporters locaux et les supporters visiteurs;
·veiller à ce que les supporters visiteurs passent rapidement les portes d'entrée, avec un minimum de temps morts;
·s'il est impossible d'assurer la même rapidité de circulation après la fin du match, les supporters visiteurs doivent attendre que les supporters locaux aient quitté les lieux;
·laisser des places inoccupées entre les supporters de l'équipe qui reçoit et les supporters venus de l'extérieur.

En plus de séparer les supporters locaux, des supporters visiteurs, il est important de séparer les supporters potentiellement violents des autres supporters. L'initiative d'incidents violents étant finalement prise par un petit nombre d'individus, il est essentiel d'apprendre à les connaître individuellement. Les possibilités d'influencer ou d'exclure des matches les supporters indésirables s'en trouvent accrues. Au cours des toutes dernières années, on a eu de plus en plus recours aux interdictions de stade. Combinées avec l'obligation de se présenter en un lieu donné (un poste de police, par exemple), les interdictions peuvent contribuer à prévenir les incidents. A cet égard, il est regrettable que les supporters violents à qui il est interdit d'assister aux matches de leur équipe dans leur propre pays, puissent encore assister aux matches de leur équipe (ou de l'équipe nationale) dans d'autres pays.
Une fois les supporters connus, il devient possible d'exercer une influence sur eux à d'autres occasions que les jours de match. Les associations et les accompagnateurs de supporters jouent un rôle important à cet égard. Dans plusieurs pays, «des programmes de supporters» ont été lancés dans le passé (par exemple, en Belgique, aux Pays-Bas et en Allemagne). Les accompagnateurs de supporters tissent des liens avec ces derniers, communiquent avec eux et tentent d'exercer une influence positive sur eux, en organisant des manifestations, en prodiguant des conseils et une aide, et en renforçant la responsabilité, etc. En outre, les accompagnateurs de supporters font lien entre les supporters et les clubs, les médias, les établissements scolaires, les autorités locales, etc. Les accompagnateurs et les associations de supporters sont l'un des rares leviers dont l'action ne se limite pas aux manifestations de hooliganisme les jours des matches.
Matches et championnats internationaux

S'agissant du problème des hooligans, il est important de distinguer entre les matches de club dans le cadre de compétitions nationales et internationales et les matches des équipes nationales. Les supporters des équipes nationales se comportent souvent différemment des supporters des clubs. C'est ainsi que la non-séparation des supporters des équipes nationales n'est pas automatiquement suivie d'incidents. Les matches sur une journée soulèvent des problèmes différents de ceux que posent les championnats.
Dans la plupart des pays, les matches de l'équipe nationale ne s'accompagnent que rarement de confrontations entre hooligans. Dans la plupart des cas, les relations antagonistes entre supporters visiteurs et supporters locaux sont moins prononcées et une sorte de «trêve» semble s'instaurer entre supporters de même nationalité. Les bagarres, si elles ont lieu, prennent pour cible les supporters étrangers, l'ennemi commun. Lors des matches à l'étranger, certains supporters se voient comme les champions de la réputation de virilité et de courage de leur pays.
L'entente engendrée par les manifestations internationales entraîne parfois une coopération entre certains groupes de supporters contre des adversaires communs. De plus, des contacts sont établis avec des supporters étrangers désireux de se joindre à la lutte contre l'adversaire commun.
Le maintien de l'ordre lors des matches internationaux est compliqué par de nombreux facteurs, par exemple le fait que la police du pays hôte et les supporters visiteurs se connaissent mal. Les différences linguistiques et le déploiement de policiers peu expérimentés risquent de compliquer les choses. La gestion des informations est ralentie. Les fauteurs de troubles potentiels peuvent se sentir moins inhibés, moins responsables et plus anonymes. La revente des billets rend plus difficile la séparation des supporters.
Au cours des quinze dernières années, des incidents violents se sont produits lors de plusieurs championnats en Europe. Etonnamment, on n'a pas facilement accès aux rapports d'évaluation de ces événements. Ceux qui existent sont surtout peu objectifs et peu structurés. Typiquement, les incidents sont minimisés. Néanmoins, il est possible de tirer des leçons intéressantes des événements passés. Pour cela, il est nécessaire de ne pas se limiter à l'analyse des incidents survenus mais aussi d'envisager ceux qui ne se sont pas produits.
En 1988, lors des championnats d'Europe en Allemagne, ce sont surtout les supporters allemands qui ont eu un comportement agressif à l'encontre des supporters anglais, de la police et des squatters. Les supporters allemands se sont montrés mieux coordonnés et plus assurés. Après l'Euro 1988, les sources policières ont souligné le rôle important que peut jouer une information adéquate sur le comportement des supporters, sur la communication avec ceux-ci et sur le rôle des observateurs de police.
Le championnat du monde qui a eu lieu en Italie en 1990 a été caractérisé, d'une part, par l'attention assez faible portée à la coopération internationale et, de l'autre, par un déploiement policier important. Les interdictions d'alcool et les mesures judiciaires ont complété le tableau. La communication entre la police et les supporters a été pratiquement inexistante, à l'exception des observateurs de police étrangers. La qualité des stades était excellente et a contribué à la bonne ambiance dans leur enceinte. Les différents lieux étaient très éloignés les uns des autres et la plupart des incidents se sont produits loin des stades lorsque les supporters italiens ont provoqué des supporters étrangers (surtout anglais). Le rôle des médias comme facteur d'escalade a été souligné.
Lors du Championnat d'Europe 1992 en Suède, pays qui connaît un problème de hooliganisme limité, des hooligans suédois, anglais et allemands ont été impliqués dans plusieurs incidents. Les forces de police déployées en grand nombre ont contenu les incidents. La participation des médias a été importante à deux égards: en plantant le décor par une couverture sensationnaliste et parce que les journalistes sont devenus la cible des agressions des hooligans anglais. A cette occasion aussi, le recours aux observateurs de police s'est avéré utile bien que toutes les forces de police étrangères n'aient pu considérer la coopération internationale comme optimale. Les observateurs ont fourni aux forces de police locales des informations tactiques sur le comportement des supporters et des hooligans, et ont servi d'intermédiaires avec leurs supporters et transmis à la police locale des informations personnalisées sur les individus. On est souvent resté dans le flou sur le genre d'informations attendues et l'utilisation des informations transmises. La vente des billets s'est avérée être une importante source d'information.
En 1994, la Coupe du monde a eu lieu aux Etats-Unis. Elle s'est caractérisée par un poids commercial accru. Les effets positifs d'une communication active de la police, des stadiers et des accompagnateurs de supporters avec ces derniers a fait de cette Coupe du monde une manifestation sans incidents majeurs.
Les championnats d'Europe de 1996 ont eu lieu en Angleterre. Pour la première fois, seize pays y participaient. Les supporters anglais ont manifesté avec violence dans tout le pays après la défaite de l'équipe anglaise contre l'Allemagne. Aucun autre incident majeur ne s'est produit en dépit du fait que la séparation des supporters n'était pas complète. L'explosion d'une bombe de l'Ira à Manchester a démontré la vulnérabilité d'une grande manifestation aux actes de terrorisme. La police anglaise a conclu que l'Euro 96 avait connu un niveau sans précédent de planification et de coopération entre de nombreuses organisations, à la fois au niveau national et au niveau international. Un centre de coordination centralisée avec des agents de liaison des polices d'autres pays a été créé. La qualité et l'exactitude des informations des services de renseignements et des informations sur le transport des supporters ont été variables, car certains pays participant à la compétition ne disposaient pas de l'infrastructure nécessaire. Là aussi, les observateurs de police ont fait la preuve de leur utilité dans l'opération de renseignement. On a souligné l'extrême importance d'une stratégie efficace à l'égard de la presse et des médias nationaux.
L'existence d'une autorité de contrôle du football a contribué à la sécurité des stades. A cause de la tragédie de Hillsborough, les stades n'étaient plus équipés de grillages, sans que cela n'ait posé de problèmes. Certains pays avaient amené leurs propres stadiers et accompagnateurs de supporters, ce qui a contribué à la prévention des incidents.
Lors de l'Euro 1996, la coopération internationale était devenue courante. Elle ne concernait pas seulement la coopération avec les pays participants mais aussi avec les pays de transit.
La Coupe du monde 1998 a eu lieu en France et a duré plus d'un mois. Là aussi, la grande majorité des matches qui ont eu lieu dans les six villes d'accueil se sont déroulés sans incidents. Toutefois, quelques graves troubles se sont produits auxquels participaient des supporters allemands et anglais ainsi que des jeunes du pays. Pour les supporters anglais, au contraire des supporters d'autres pays, une relation a été établie entre une consommation d'alcool excessive et la participation aux incidents.
Le rapport de sécurité publié après cette manifestation, souligne le fait que le maintien de l'ordre pendant une manifestation de ce genre ne peut se faire sans une préparation dépassant les frontières nationales ou une concertation au sein de l'espace de Schengen. La coopération des forces de police au niveau international doit être poursuivie et développée afin d'améliorer la connaissance des risques et l'adaptation des méthodes et pour apprendre à mieux connaître des foules aux origines culturelles différentes. Le rapport estime qu'il est essentiel d'évaluer les troubles potentiels à l'ordre public. La coopération des forces de police étrangères est indispensable en la matière.
Comme ce fut le cas avec les championnats antérieurs, l'échange d'informations au niveau international a été variable en quantité et en qualité. Il a été difficile de coordonner l'action opérationnelle de délégations très différentes sur le plan de la culture, de la langue, de l'organisation policière, de la connaissance du phénomène de l'hooliganisme, des systèmes politiques et ayant, de ce fait, des approches différentes de l'ordre public. Les événements ont mis à jour des différences flagrantes dans les méthodes de travail des agents de liaison des différents pays. Les observateurs ont dissuadé certains supporters de dépasser les bornes et permis l'identification des plus violents d'entre eux ayant troublé l'ordre public. La police des transports britannique a accompagné les supporters en train jusqu'en France.
Le rapport de sécurité recommande la création d'un groupe de réflexion dans chaque pays afin de définir et d'appliquer les meilleures mesures de prévention. La procédure utilisée pour vendre les billets a rendu quasiment impossible la séparation des supporters des équipes rivales. Le système de vente des billets était aberrant et a entraîné des risques pour la sécurité.
Les championnats prennent de l'ampleur: ils durent plus longtemps et les pays participants et les matches sont plus nombreux. L'emprise commerciale se fait de plus en plus sentir. Deux éléments méritent une attention particulière pendant les championnats internationaux: les supporters de chacun des pays participants et la population locale dans le pays où les championnats ont lieu. Lors de chacun des championnats qui se sont tenus en Europe au cours des quinze dernières années, les jeunes du pays (pas obligatoirement des hooligans) ont provoqué des incidents dans le pays organisateur. En outre, dans certains des pays participants, des incidents se sont produits avec les jeunes restés chez eux.
Le renseignement est manifestement un facteur fondamental pour faire face à la situation lors de manifestations internationales. On va nettement vers une coopération et une coordination accrues entre les pays et les forces de police concernés, à la fois avant et pendant les matches et les championnats. Toutefois, ces mesures sont loin d'être optimales. De nombreux pays ne sont pas en mesure de fournir les informations nécessaires et les pays ayant une longue expérience du problème du hooliganisme ont souvent l'impression que leur expérience n'est pas pleinement exploitée.
Comme toujours, la communication  ou son absence  semble être un facteur clé dans la prévention ou l'escalade des incidents. Cela ne concerne pas seulement la communication entre les personnes concernées par la sécurité. En particulier, comme pendant la période précédant les championnats, une couverture médiatique encline au sensationnalisme ou à l'exagération, flattant parfois les tendances nationalistes, contribue à créer un climat propice au hooliganisme. Des actions de communication entreprises avec les supporters par les forces de police, les stadiers et les accompagnateurs de supporters contribuent à la prévention des incidents, surtout si les personnes qui les connaissent bien parlent la même langue que les supporters.
Lorsque les renseignements, la coopération, la coordination et la communication ne sont pas pleinement exploités, des mesures répressives, moins adéquates, tendent à prévaloir. Les possibilités de gérer en toute sécurité une manifestation éphémère telle qu'un championnat, sont limitées par l'application (ou l'absence) de politiques à long terme des pays participants concernant le problème du hooliganisme dans le football. En outre, la gestion sécuritaire des championnats et des matches internationaux pourrait bénéficier d'une évaluation plus systématique, structurelle et objective.
Conclusion

Le hooliganisme dans le football est préjudiciable au sport. Grâce en partie aux mesures de sécurité prises dans le passé, le phénomène revêt maintenant d'autres formes. Pour éviter les effets du hooliganisme, les mesures répressives devront désormais être complétées par une approche sociale et préventive.

L'expérience prouve que plusieurs éléments sont essentiels pour limiter les excès de l'hooliganisme:

- une bonne coopération et une bonne coordination (internationales);
- la participation active des clubs et des instances nationales et internationales du football;
- une démarche intégrée prévoyant des dispositions contraignantes pour toutes les parties concernées;
- un effort d'information en direction des supporters et des hooligans;
- si possible, l'interdiction pour les hooligans d'assister aux matches (et d'influencer d'autres supporters);
- la communication avec les supporters/hooligans de la part de la police, des clubs/stadiers et des accompagnateurs de supporters;
- un engagement à long terme qui ne se limite pas aux incidents et aux mesures à court terme.